EDITH LASSIAT     
 
 
Textes
 
Nouvelles autobiographiques "Le Murmure de l'arbre", 2008

L'aventure est au fond de soi… même quand elle arrive au bout du monde.
Comment accompagner sa propre métamorphose, quand elle arrive de manière aussi étrange que par la rencontre d'une initiée masquée, d'un chaman espagnol ou d'un autiste lumineux ? Oublier les certitudes, les repères pour aller découvrir au travers de ces êtres étranges ses propres richesses, ses dons insoupçonnés ou la parole longtemps étouffée d'un fœtus ?
Accepter des leçons de vie parfois si dérisoires qu'on oublierait même de les reconnaître : "Respirer, déconnecter son cerveau, rencontrer le monde dans sa cuisine"…
Résister au regard familial et social et oser aller se confronter à soi-même, à ses peurs, à ses croyances les lus ancrées ?
Les nouvelles de ce livre sont l'histoire plurielle d'une trajectoire singulière, un histoire sans fin.

Extrait : Le fœtus…

"Il m'est arrivé par mon père, un drôle de cadeau, on pourrait dire un cadeau empoisonné. Un petit flacon et dedans, un fœtus.
Un petit bout de "vie" dans un minuscule flacon de formol, bien scellé par un petit bouchon en caoutchouc rouge, lui-même scellé par du sparadrap comme dans un laboratoire médical. Digne d'un cabinet de curiosités.
C'était dans les années 60, j'avais à peine 4 ans quand ce personnage est "entré dans notre famille".
Mon père aurait tant aimé être chirurgien. J'ignorais alors sa vocation manquée, de peu, de si peu, à cause d'un départ à la guerre à 17 ans, lui qui voulait étudier, je ne l'ai compris que plus tard. C'est pourtant vrai qu'il accumulait alors les livres de science, de médecine. En particulier ceux qui traitaient des anormalités, des êtres aux confins, des oubliés de la terre, aux anomalies physiques, aux distorsions. Il cherchait peut-être dans l'étrange une clef de lecture de l'humain. Les astres ne lui suffiraient pas, il lui fallait tout comprendre. L'humain du dedans, du dehors, par tous ses angles, surtout les plus bizarres. Il chercha donc la clef dans la tératologie, cette science de l'étrange sur l'étude des anomalies et des monstruosités des êtres vivants.

La tératologie ou les prémices de la génétique…"


Le Jeu du Je

Faire le silence,
Accueillir,
Sans jugement, ce qui advient,
Regard du cœur,
Yeux d'amour,
Vierge, anges, compas, lignes, ou tâches,
L'histoire s'écrit,
A mon insu,
Histoire des hommes,
Histoire de foi,
Histoire d'avant le temps,
Oubliées, engrammées,
Ressurgies sous ma mémoire,
Archaïque,
Prégnante.

Fragments

Création papillon,
Mes doigts volent, mes yeux courent,
Parcourent les espaces des toiles,
Qui s'enchaînent et me libèrent.
Silence dedans pour lumière dehors,
Jeu du je,
Les images s'imposent,
Parfois se refusent,
Et se placent, seules,
Rythme des œuvres,
Sens caché,
Je me tais…

Calligraphies

Créations subtiles, faites avec une attention extrême à ce qui naît sous les mains, légèreté, gravité, silence, retenue et enfin étonnement de ce qui apparaît. J'en suis l'accoucheuse, attentionnée, précise.
Actrice de l'abandon, du lâcher, juste assez présente pour apporter mon regard et mon geste, l'ego est remisé ni trop, ni trop peu, pour que la poésie s'exprime, musique ciselée.
Les voiles, l'épure, les reliquats d'images, le sens, les portes ouvertes, l'infini et l'intime se rejoignent.Simplicité apparente d'œuvres complexes, rythmées, dépouillées et foisonnantes, elles portent leur contradiction, celle de l'Etre humain, entre pudeur et expression, entre le moi et la disparition, elles disent sans dire, et ne révèlent que ce que l'on est prêt à y lire.
Quelle est la vraie part de l'artiste dans l'œuvre, je ne parle pas du geste qui reste un élément très personnel, du savoir faire, mais de cette fameuse inspiration, de cette part universelle qui lui donne une portée particulière, voire unique.
C'est cette partie-là qu'il est difficile de maîtriser, elle nous échappe, et requiert patience, extrême attention, subtilité, celle de la reconnaissance de l'instant où émerge du fond de notre être une petite voix, un souffle, un mouvement que notre corps doit relayer.
À ce moment, il faut abandon total et absolu, lâcher, et confiance…
Sans vigilance, tout ceci serait pourtant vain.
Quelle quadrature du cercle.
L'artiste se nourrit de rêve, de pensée flottante, libre, voyageuse, elle doit circuler comme une libellule, ne pas rencontrer d'obstacle, se nourrir de l'air du temps, d'émotions, de doutes, de sensations, de douleurs aussi. Poésie de l'âme, temps suspendu, voyage intérieur et sans frontière, dans un espace ouvert, sans jugement, sans frein.

Le pouvoir des mots

Il faut bien recommencer,
Tirer un fil, même minuscule et si tenir…
Parfois c'est difficile de s'y coller,
Alors c'est le papier qui s'y colle.
Papier de soie si fragile, transparent,
Il n'y a rien à cacher…
Des textes, des poèmes, très abstraits,
Tellement éludés qu'ils frôlent l'absence…
Des poèmes de silence
Où les mots pudiques se cachent derrière des images,
Des textes désoeuvrés qui résonnent dans nos cœurs,
Des mots à lire et à relire avant qu'ils ne se livrent.
Des mots à notre insu, des mots de mystère,
Des mots à double fond.
Je les libère, je leur fais confiance,
Ils s'organisent dans mon espace intérieur,
Trouvent un chemin entre mes peurs,
Et me livrent leurs secrets.
Je tombe en leur pouvoir, ils me gouvernent un instant,
Puis s'envolent,
Et m'emmènent avec eux dans une drôle de ronde.

Ange de passion

Rouge sang,
Sur cristal de soie,
Le feu de glace.
Me brûle,
Corps étreint,
Apparition,
Disparition.
C'est la ronde des anges,
Regards croisés,
Attente, fusion,
Dans la distance,
La convergence.
L'embrasement
De mes sens.
Lancinant,
Le tango hante mes gestes,
Repli, avancée,
Tout s'enchaîne,
En volupté.
Rythme sans fin,
C'est la danse des anges

serie bleu ange

serie bleu ange

serie bleu ange

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